Est Entrepôt en renfort du taux de service des distributeurs

Les exigences du marché français de la distribution de pièces détachées ont fait naître au fil du temps les plateformes de stockage indépendantes. Leur mission ? Fournir les distributeurs qui sont à la recherche de pièces qu’ils n’ont pas en stock et que leur centrale n’est pas en mesure de leur livrer en temps et en heure pour diverses raisons. Les problématiques actuelles de manque de disponibilité de pièces qui persistent chez les fournisseurs et la multiplication des références font leur jeu.

Ces plateformes, désormais à même de livrer en H+4 sur leur secteur, tirent leur force d’une offre riche et souvent complémentaire à ce que les grandes centrales d’achats proposent. Elles représentent une alternative en termes de marques comme de familles de produits. Une pièce sur dix vendue par un distributeur serait ainsi fournie par une plateforme externe comme l’est Est Entrepôt qui fait référence dans le domaine avec ses 35 ans d’expérience et de croissance.

L’entreprise a été fondée en 1989 par Jean-Luc Picard alors commercial à son compte, représentant pour certaines marques de batteries et d’échappements, dont Monroe. C’est cette dernière qui pousse son partenaire à acheter un stock et vendre directement les pièces aux grossistes. Un premier petit entrepôt est alors créé au centre-ville de Nancy. La mayonnaise prend, la success-story aussi avec l’arrivée d’autres marques (EFI Automotive, Continental, NTN, Febi Bilstein…), et de nouveaux produits en stock. C’est en 1996 que s’opère le grand décollage. L’entrepôt s’agrandit, les références se multiplient, Est Entrepôt embauche et se modernise en s’informatisant pour gagner en productivité. En 1998, la plateforme commence à introduire la livraison à la demie-journée avec une sous-traitance des navettes de livraison. « L’argent gagné a toujours été réinvesti dans le stock qui est le nerf de la guerre de notre développement » souligne le fondateur.

15 000 m2 d'entrepôt

Dix ans plus tard, Est Entrepôt prend possession de ses locaux actuels basés à Jarville la Malgrange, à 3 km de Nancy. La surface est triplée, passant de 3000 m2 à plus de 9000 m2 (15 000 m2 de surface de stockage). L’organisation est améliorée et semi-automatisée. Le centre commence aujourd’hui à ne plus suffire même s’il n’est utilisé qu’à 50 % de ses capacités logistiques avec l’envoi de 2000 colis par jour en moyenne. Il stocke 600 000 pièces avec 134 000 références venant de 70 fournisseurs dont 80 % sont des équipementiers d’origine. « Nous proposons tout sauf des pneus et des éléments de carrosserie » précise Jean-Luc Picard. Ce sont 10 semi-remorques qui livrent quotidiennement le centre logistique.

Passage de flambeau

Désormais âgé de 65 ans, le fondateur souhaite prendre sa retraite et passer le relais des responsabilités à son fils Arnaud Picard, 33 ans, qui a grandi avec la plateforme en y étant salarié en 2012 en tant que responsable des opérations logistiques. L’entreprise, dont il connaît tous les rouages, comptait alors 12 salariés. « J’ai toujours adoré l’automobile et ce marché de la distribution. C’est une passion qui m’a toujours animé » commente le futur président qui prendra ses fonctions en fin d’année. Pour l’occasion, l’entreprise change de logo tout en préservant ses couleurs historiques jaune et noir.

Jean-Luc et Arnaud Picard

Quand l'indépendance est une force

Sur un secteur de la distribution de pièces détachées qui a connu de fortes concentrations ces 20 dernières années, avec la création de grands groupes qui réalisent des milliards d’euros de chiffre d’affaires, Est Entrepôt souhaite rester totalement indépendant. « Cette indépendance est notre force ! C’est historique et cela restera l’un de nos piliers » assure Arnaud Picard. Cette indépendance, qui fait la singularité de l’entreprise, lui permet une marge de manœuvre totale dans le choix de ses fournisseurs et de ses clients, sans contraintes. « Nous achetons et nous vendons à qui nous voulons, il n’y a pas de barrière concurrentielle. Nous traitons en direct avec les fournisseurs dont certains nous demandent cette indépendance qui sert aussi leurs intérêts pour développer leurs ventes de manière indirecte » explique Arnaud Picard.

Une liberté qui demande toutefois d’être annuellement en négociation avec les fournisseurs, ce qui prend du temps et qui écarte de fait certaines marques qui préfèrent traiter uniquement pour de gros volumes et pour l’ensemble de leur catalogue. Les principaux fournisseurs d’Est Entrepôt sont des équipementiers qui cherchent la plupart du temps à se faire une place sur le marché, en manque de négociations avec les grandes centrales d’achats souvent trop exigeantes.

Aux yeux du jeune dirigeant, rejoindre un groupement d’indépendants reste compliqué en raison du difficile alignement des offres compte tenu de l’historique de chacune des plateformes et des exigences régionales différentes de la part des clients. « Le gain réel apporté par un groupement au niveau des achats n’est pas si important que cela et ne justifie pas les contraintes d’organisation pour faire en sorte que la structure vive » explique Arnaud Picard, convaincu que sa plateforme peut très bien vivre sans se rallier à un groupement quel qu’il soit. Le dirigeant parle en connaissance de cause, son père ayant été membre fondateur du groupement Apprau, avant de le quitter deux ans plus tard pour préserver toutes ses marges de manœuvre.

Une service à la hauteur de l'offre

En ce qui concerne le service, Est Entrepôt rayonne sur 13 départements avec une livraison 2 fois par jour. Le cut-off matinal est à 11h pour une livraison à 14h. En soirée, l’heure limite de commande est 19h pour une livraison nocturne. La société affiche un taux de service de 90 %. Un taux qui grimpe à 96 % si l’on considère l’appui de la marque de pièces alternatives Open Parts de l’italien Exo Automotive, avec qui Est Entrepôt commerce depuis 2006. Elle représente plus de 10 % des ventes. Pour tenir sa promesse du taux de service, la plateforme n’hésite pas non plus à se fournir chez des confrères européens ou à acheter des pièces d’origine, souvent captives des constructeurs. « Nos seules motivations sont d’avoir du stock et de dire oui aux clients » résume Arnaud Picard.

Avec ses 41 salariés, dont 31 magasiniers, Est-Entrepôt livre 650 clients pour un chiffre d’affaires de 28 millions d’euros, en progression de 17 % en un an. L’entreprise défend ses valeurs familiales avec des collaborateurs fidèles, parfois présents depuis plus de 20 ans. Cette fidélité est aussi travaillée au niveau des clients et des fournisseurs « même si la marque n’est plus en vogue. Ensemble, on essaie de la développer. Nous sommes dans le partenariat de long terme. On se fait confiance » explique Arnaud Picard.

Brancher la plateforme à la logistique des grands groupes

Les dirigeants souhaitent désormais étendre le rayonnement d’Est Entrepôt en mettant le stock, qui restera le seul en France, à disposition des grands groupements de distribution comme c’est le cas avec Parts Holding Europe où l’entreprise est informatiquement connectée au catalogue Autossimo pour des livraisons en 24 heures. Cette collaboration en référencement central représente déjà 20 % des ventes d’Est Entrepôt.

L’année 2024 démarre très bien pour le distributeur qui prévoit un chiffre d’affaires en nette augmentation, autour des 33 millions d’euros. Il vise à court terme les 40 millions avec l’arrivée de nouveaux clients, comme des concessionnaires mais aussi des enseignes de réparation rapide, des pneumaticiens et des centres auto, mais aussi, pourquoi pas, les flottes. La livraison directe aux ateliers n’est absolument pas à l’ordre du jour. À ce stade, la distribution traditionnelle représente 70 % de la clientèle. Le développement de la société passe aussi par l’ajout de nouvelles gammes de pièces liées aux évolutions technologiques. « Nous devons être là dès les premières demandes » conclut Arnaud Picard.